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dimanche 23 avril 2023

Le dernier homme de Charles L. Bitsch (1969) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

La science-fiction post-apocalyptique est un sous-genre de la science-fiction à part entière qui a contaminé les littératures et cinémas du monde entier. La France n'a d'ailleurs pas été la dernière à se mettre à l’œuvre car contrairement aux apparences, il faut remonter assez loin dans le passé pour y trouver quelques exemples de métrages tombés dans l'oubli. Bien avant l'excellent 2021 que Cyril Delachaux bricola en 2020 avec ses propres moyens, avant le génial Delicatessen de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro en 1991, Le dernier combat de Luc Besson en 1982 ou le Malevil de Christian de Chalonge l'année précédente, le réalisateur de seconde équipe français Charles L. Bitsch fut l'auteur d'un long-métrage méconnu intitulé Le dernier homme. Lui qui fut assistant-réalisateur sur les tournages de Le doulos de Jean-Pierre Melville, Landru de Claude Chabrol ou Le mépris et Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution de Jean-Luc Godard adaptait à l'écran à la toute fin des années soixante son propre scénario (rien à voir donc avec le roman éponyme de la romancière canadienne Margaret Atwood qui fut édité bien plus tard). Produit par Pierre Meurisse et sorti sur les écrans le 20 décembre 1970, Le dernier homme met en scène trois personnages qui par chance se retrouvèrent coincés sous terre alors qu'au dessus de leur tête une catastrophe se produisait. Non pas à cause de l'usage d'armes bactériologiques ou nucléaires mais dont l'origine semble avoir été chimique. Résultat, tout ce qui ne fut pas mis à l'abri au moment où survint le drame se retrouva condamné à une mort certaine. C'est ainsi que Jean-Claude, Catherine et Eva remontent à la surface pour découvrir que personne au village n'a survécu et qu'ils sont donc les uniques survivants. Même les animaux n'ont pas été épargnés. À l'image du cadavre d'un chien que découvrira d'ailleurs Jean-Claude lors de sa première visite au village. À ce propos, il est intéressant de noter qu'un chien semble avoir malheureusement fait les frais du tournage comme en témoigne le court-métrage Le cabot qu'à réalisé quelques années plus tard Jean-Pierre Letellier. inspiré d'une séquence du Dernier homme lors de laquelle un chien fut tué pour les besoins du film. Une mise à mort réelle que ne semble d'ailleurs pas avoir apprécié la censure de l'époque qui interdit toute projection du court-métrage. Il faudra patienter jusqu'en 2009 pour que soit visible au Centre Pompidou le 23 avril de cette année là Le cabot qui fut projeté lors d'un cycle consacré à la Sociologie de l'absurde...


Corinne Brill, qui interprète le rôle d'Eva n'a semble-t-il plus jamais participé au moindre tournage. Quant à Sofia Torkeli qui elle interprète celui de Catherine, elle n'a tourné que dans cinq projets durant toute sa carrière entre 1964 et 1974. Reste Jean-Claude Bouillon, célèbre interprète du personnage du commissaire Valentin dans la série de Victor Vicas entre 1974 et 1983, Les brigades du tigre. Décédé en 2017 à l'âge de soixante-quinze ans, l'acteur n'aura cessé de tourner durant sa carrière, jonglant entre cinéma, télévision et théâtre. Dans Le dernier homme , il incarne un Jean-Claude assez peu sympathique. Profitant de son statut de seul mâle à avoir survécu à l’apocalypse pour adopter un comportement misogyne qui transparaît lors de ses rapports avec les deux seules femmes qui vont désormais évoluer à ses côtés dans un contexte moribond détaillé de manière réaliste à travers un inventaire parfois saisissant : cadavres d'hommes et de femmes jonchant le pavé, visages gris et marqués par d'inquiétantes tâches d'origine inconnue, animaux morts, rats envahissant les rues, odeurs de cadavres insupportable, architectures délabrées dues à des inondations, si Le dernier homme fait figure de parent pauvre d'un genre qui en général propose des tableaux d'un monde en déliquescence particulièrement saisissants, l'impression de solitude est par contre plutôt bien retranscrite. Dans ce nouveau monde où le danger semble tout autant provenir des risques liés à la contamination que du comportement inquiétant du personnage masculin incarné par Jean-Claude Bouillon, le réalisateur parvient à maintenir une certaine tension malgré des moyens réduits. Le dernier homme demeure un bel exemple de science-fiction dystopico-apocalyptique à la française qui obtint L'astéroïde d'or au festival international de Trieste en 1969 et qui mériterait d'être redécouvert...

 

jeudi 2 décembre 2021

In the Year 2889 de Larry Buchanan (1969) - ★★★★☆☆☆☆☆☆

 


 

À l'origine du téléfilm américain In the Year 2889, la nouvelle La Journée d'un journaliste américain en 2889 de l'écrivain français Michel Verne, fils du célèbre Jules Verne. Un court texte que certains estiment avoir été écrit de la main du père mais qui semble bien avoir été rédigé par le fils. Bien que la dite nouvelle aborde toute une série de thématiques s'inspirant des techniques supposées en cours au vingt-neuvième siècle, le téléfilm de Larry Buchanan (auteur entre autres de quelques pellicules d'horreur et de science-fiction) s'intéresse avant toute autre chose aux conséquences d'une guerre nucléaire à l'échelle mondiale qui aurait décimé la quasi totalité de l'espèce humaine. L'intrigue se déroule principalement dans la demeure isolée de l'ancien capitaine de police John Ramsey (interprété par l'acteur Neil Fletcher) que sa fille Joanna (Charla Doherty) contraint d'accepter toutes celles et ceux qui viennent frapper à leur porte alors que les rations alimentaires sont prévues pour seulement trois personnes (la venue du fiancé de la jeune femme étant prévue pour très bientôt). L'arrivée de cinq personnes va tout remettre en question. D'autant plus que parmi les invités forcés se trouve un certain Mickey Brown (Hugh Feagin) dont les intentions ne semblent pas tout à fait honnorables et de Steve et Granger Morrow (Paul Petersen et Max W. Anderson), ce dernier étant très gravement malade à cause des radiations nucléaires. À contre-cœur, John Ramsey accepte la présence de ces étrangers et de Tim Henderson (Bill Thurman), un alcoolique, ainsi que celle de Jada (Quinn O'Hara), une danseuse de boite de nuit. Tous ensemble, ils vont tenter de survivre dans un monde devenu le terreau fertile d'étranges mutations génétiques chez les animaux. Et notamment chez un individu monstrueux qui rôde dans les parages et qui s'en prend à toutes celles et ceux qui passent à proximité...


Avec une telle ambition et un tel synopsis, on se prend à rêver d'un film de science-fiction apocalyptico-dystopique de grande ampleur. Sauf qu'en la matière, le compte n'y est pas du tout. De son statut de simple téléfilm de la fin des années soixante, l'enrobage est à l'avenant d'une mise en scène relativement déplorable. Ne comptez absolument pas sur de quelconques visions de cités dévorées par une mère Nature se réappropriant ses droits. Ici, l'intrigue se concentre sur une demeure isolée, entourée de montagnes protégeant les lieux de toute radiation ou presque. Beaucoup de dialogues pour finalement, pas grand chose. On le devine assez rapidement, les discordes entre les différents personnages iront bon train. Entre un ancien flic aux réflexes et habitudes bien ancrés, deux jolies donzelles dont l'une se disputera l'amour du grand méchant de l'histoire, un gentil jeune homme en la personne de Steve et une créature qui menace à tout moment de faire son apparition, le film n'est surtout qu'un grand déploiement de dialogues dont la seule présence de Mickey (le méchant en question) s'avère bien plus anxiogène que celle alentours du mutant sous les traits (parfaitement ridicules) duquel se cache l'acteur Byron Lord. Après une ouverture ultra classique signifiant la guerre nucléaire responsable de la disparition de la plupart des hommes et des femmes de notre planète à travers des images réelles d'archives mettant en scène la bombe atomique, le film développe une intrigue quelque peu semblable à celle du chef-d’œuvre de George Romero La nuit des morts-vivants, du moins dans les rapports tendus qu'entretiennent les différents protagonistes. Mais la comparaison s'arrête malheureusement là. Si à une décennie prêt In the Year 2889 situe son action à la fin du vingt-neuvième siècle, vue la pauvreté des environnements, le film aurait tout aussi bien pu se dérouler dans les années cinquante du siècle passé. Le pire de ce téléfilm demeure sans doute son improbable créature, plus risible qu'effrayante, se déplaçant dans une gestuelle aussi grotesque que le visage qu'elle arbore. Bref, en adaptant l’œuvre du fils de l'un des plus célèbres écrivains de science-fiction français, Larry Buchanan n'y a absolument pas fait honneur...

 

lundi 18 février 2019

Journey to the Far Side of the Sun de Robert Parrish (1969) - ★★★★★☆☆☆☆☆



L'apport du producteur britannique Gerry Anderson (et de son épouse Sylvia) revêt une importance considérable dans le petit monde de la télévision. Pourtant, son nom n'évoque pas immédiatement les mêmes souvenirs émus qu'un Gene Roddenberry (créateur de la série originale Star Trek), qu'un Rod Serling (celui de la série The Twilight Zone) ou encore qu'un Roald Dahl plus près géographiquement de l'artiste qui nous intéresse ici, et à l'origine de la série télévisée britannique horrifique Tales of the Unexpected . Si Gerry Anderson demeure l'un des plus illustres producteurs de science-fiction des années soixante et soixante-dix, c'est parce qu'il est le principal créateur aux côtés de celle qui fut alors son épouse, de quelques-unes des séries télévisées britanniques parmi les plus célèbres et les plus cultes. Parmi elles et bien connues sur notre territoire, Thunderbirds, traduit chez nous sous le titre Les Sentinelles de l'Air. Une série de science-fiction connue pour utiliser un procédé inventé par Gerry Anderson lui-même, la Supermarionation qui comme son nom ne l'indique pas forcément, consiste en l'animation de marionnettes, lesquelles prennent vie dans cette série devenue culte. Gerry Anderson, c'est également la série UFO : Alerte dans l'Espace, mais plus encore Cosmos 1999 qui pour rentabiliser son financement (la série reviendra à sept million de dollars de budget) s'assurera des rentrées d'argent à l'internationale en employant le couple Martin Landau/Barbara Bain dans deux des principaux rôles.

Au cinéma, des rares incursions du producteur sur grand écran, on se souviendra surtout de Journey to the Far Side of the Sun, traduit chez nous sous le titre Danger, Planète Inconnue. Sur le thème passionnant de la planète jumelle, Gerry et Sylvia Anderson offrent au réalisateur Robert Parrish un concept fort intéressant. Imaginez donc : en 2069, la sonde Sun Probe découvre que derrière le Soleil se trouve une planète située sur la même orbite que la Terre. Jason Webb, le directeur de EUROSEC (le Conseil européen pour l'Exploration Spatiale) décide d'y envoyer une mission habitée. A bord, l'astrophysicien John Kane ainsi que le colonel Glenn Ross. Après trois semaines de voyage dans l'espace, ils arrivent aux abords de la nouvelle planète. Mais alors qu'ils prennent la décision de descendre à sa surface, l'engin de transport devant les y emmener est frappé par un éclair. Accidentés, ils sont secourus par une équipe de sauvetage en mer qui leur affirme que leur engin s'est écrasé dans la région d'Oulan Bator en Mongolie. Les deux astronautes sont alors convaincus d'être retournés sur Terre...

Des deux astronautes, seul le colonel Glenn Ross parvient à survivre au crash. Interrogé sur les raisons pour lesquelles selon ses supérieurs, Kane et lui ont choisi de faire demi-tour, le colonel Ross a beau insister sur le fait qu'il n'en est rien, la hiérarchie bute sur ses explications. Petit à petit, il se rend compte que malgré les apparences, il a bien atterrit sur la planète située de l'autre côté du Soleil. En tout point semblable à la Terre, le colonel constate que tout y est pourtant inversé. Journey to the Far Side of the Sun est l'exemple même de l'idée gâchée. En optant pour une première partie se traînant en longueur, le véritable enjeu du scénario ne s'offre au final que la partie congrue du récit. Le formidable développement auquel le spectateur aurait pu prétendre assister se résume au final, à peu de chose. Visuellement dépassé, le film de Robert Parrish ne tient pas sa promesse et le brillant scénario de Gerry et Sylvia Anderson n'offre aucune surprise. Le passage par cette terre jumelle sera de courte durée, balayée en moins de temps qu'il ne faut pour la résumer.
Quant à Roy Thinnes qui voyait là l'occasion de changer quelque peu de registre (fini les extraterrestres des Envahisseurs même s'il s'agissait encore une fois de science-fiction), Journey to the Far Side of the Sun ne sera pas l'occasion pour l'acteur d'entamer une grande carrière cinématographique. Malgré la déception, beaucoup considèrent cependant le film de Robert Parrish comme un classique de la science-fiction. On y retrouve bien sûr la patte graphique de Gerry Anderson, avec ses maquettes et leur design spécifique de l'époque. Si le fond est relativement décevant, la forme, elle, qui choisit parfois le réalisme au détriment du divertissement, n'est pas négligeable. Au final, Journey to the Far Side of the Sun est une semi-déception...

mardi 1 mai 2018

Paris n'existe Pas de Robert Benayoun (1969) - ★★★★★★★★☆☆



Paris n'existe Pas est une authentique surprise. Long-métrage post Mai 68, plusieurs détails attirent l'attention, dont la présence de l'acteur, compositeur et interprète français Serge Gainsbourg qui dans l'ordre d'importance des personnages tient la troisième place après Richard Leduc dans le rôle du héros Simon Devereux et Danièle Gaubert dans celui d'Angela. Réalisé par l'écrivain français d'origine marocaine Robert Benayoun, Paris n'existe Pas ferait presque regretter qu'il n'ait mis en scène lui-même que deux longs-métrages. Celui-ci, ainsi que Sérieux Comme le Plaisir sept ans plus tard en 1975. Le récit tourne autour de Simon, artiste-peintre, qui, sentant que le courant pictural tourne, est en perte d'inspiration. Proche de Laurent, et compagnon d'Angéla, il découvre bientôt qu'il a la capacité d'agir sur le temps et sur les objets qui l'entourent. Après plusieurs expériences menées chez lui, le jeune homme découvre qu'il peut également voyager dans le passé et percevoir l'avenir proche. C'est ainsi qu'il prévoit quelques menus événements (comme un vase ou une bouteille de lait se brisant au sol), mais aussi qu'il est en mesure de se transporter jusque dans les années 30, à l'endroit même où il vit, dans un appartement qui a depuis connu quelques changements et qui quarante ans plus tôt était la propriété d'une jeune femme séduisante sous le charme de laquelle Simon va tomber...

Lorsque débute Paris n'existe Pas, on est encore loin d'imaginer le pouvoir d'attraction qui va s'instaurer entre l’œuvre de Robert Benayoun et le spectateur. Démarrant sous des auspices psychédéliques post-soixante huit-ardes prétentieuses, et dont les contours risquent de brouiller la perception des non-initiés en matière de métaphysique et d'ontologie, le film se révèle peu à peu d'une très grande cohérence et d'une intelligence rare. Évoquant aussi bien le temps sous toutes ses formes, Paris n'existe Pas aborde également la réalité des choses qui nous entourent. Le rapport au temps est très clairement établi lors des premières séquences du long-métrage nous renvoyant au quotidien d'hommes et de femmes lui étant directement confrontés : l'un consulte sa montre et réalise qu'il a raté son train. L'autre apprend l'avantage des fuseaux horaires, lui permettant ainsi de gagner une demi-heure lors de son voyage en avion. Un homme apporte sa montre qui ne cesse de retarder de cinq minutes chez un horloger. Ou là, encore, le directeur d'un journal demande à l'un de ses rédacteurs de lui fournir un article pour la veille au soir. Des exemples qui déjà, dans leurs propos, exploitent de manière théorique le voyage dans le temps.

Paris n'existe Pas est une formidable leçon de mise en scène car à partir des documents d'archives explorant le Paris des années trente (de vieilles cartes postales en noir et blanc), Robert Benayou parvient à rendre crédible les aventures de son héros. Mais ce n'est pas tout. Car plus que le jeu convaincant de ses interprètes, le film accumule des séquences animées image par image tout à fait remarquables pour l'époque. Et c'est sans compter sur celles durant lesquelles, Simon est directement projeté dans le passé de son appartement, au contact d'un jeune femme dont quelques atours vestimentaires laissent entendre qu'elle vit dans une autre époque. La preuve qu'avec quelques bouts de ficelle et une imagination sans borne l'on peut faire des miracles. L'aventure de Simon est passionnante. Mais alors que le sujet du voyage dans le temps est une chose convenue entre le héros et les spectateurs, arrive l'éventualité que tout ceci n'est que le fruit de l'imagination d'un artiste-peintre en perte de vitesse et mis dos au mur, face à ses démons. On hésite alors à parler de fantastique, de science-fiction, et la réalité nous revient au visage de plein fouet en évoquant l'éventuelle schizophrénie dont pourrait être atteint Simon.
Seule la fin nous aiguillera, après un fabuleux montage de milliers d'images renvoyant au passé, au présent et au futur du héros. Auteur de la partition musicale, laquelle participe généreusement au climat passionné et passionnant de Paris n'existe Pas, Serge Gainsbourg se révèle quant à lui très à l'aise dans le rôle de l'ami, imperturbable dandy fumant du tabac sur porte-cigarette. A noter au passage qu'il s'agit de la toute première collaboration entre le génie de la chanson française et l'arrangeur Jean-Claude Vannier avec lequel il signera deux ans plus tard, l'immense chef-d’œuvre Histoire de Melody Nelson. Quant au long-métrage de Robert Benayoun, il n'est pas loin de mériter la même appellation tant le film et le thème qu'il aborde se révèlent d'une maîtrise quasi irréprochable... A voir absolument...

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